Il suffit qu’un des frères sorte dans les rues du
village de La Carneille pour avoir la
confirmation que la communauté s’est parfaitement
enracinée dans cette parcelle de Suisse normande.
Ce matin, pendant que Paul célèbre la messe à
l’EPAHD de Briouze, à 12 km, et que Dominique
tond des pelouses dans la commune voisine de
Sainte-Opportune, Claude, parti chercher le pain,
salue le garagiste, bavarde 5 minutes avec un voisin,
échange quelques plaisanteries avec une dame qui
vient de temps à autre prier avec eux. Emmanuel,
lui, est parti pour la journée à Rouen au titre de son
quart-temps en tant qu’aumônier diocésain
de l’ACE (Action catholique des enfants).
Soutien à l’Action catholique rurale/présence au
travail/écologie ; voilà le trépied sur lequel repose
la communauté !
QUATRE TRAVAILLEURS DE LA TERRE
La communauté, qui vit au rythme de la nature doit
également s’adapter car elle est l’une des rares à compter à parité deux retraités et deux salariés.
Dominique partage son temps entre la mairie de
Sainte-Opportune le mardi comme cantonnier,
une jardinerie à Argentan trois jours par semaine
et des travaux de jardinage ou défrichage chez
des particuliers. Ce fils d’agriculteurs, titulaire
d’un BEP de jardinier qui fut vendeur en jardinerie
affirme qu’il est « sensible mais pas moteur »
dans cette recherche écologique. Il le dit… tout
en préparant artisanalement les yaourts pour la
communauté et en racontant qu’il «ne désherbe
jamais avec le pulvérisateur ».
Le deuxième jardinier salarié, intervenant chez des
personnes souvent âgées et veuves, c’est Emmanuel.
Ingénieur en agriculture, passionné de botanique,
il a suivi une formation en écologie appliquée, a
participé à des rencontres avec le groupe de travail
«Mode de vie Environnement » de la Conférence
des évêques de France, collabore à un blog «Église
et écologie » et est membre d’un réseau d’écojardiniers. Il faut l’avoir accompagné dans son carré de terre pour percevoir sa fibre verte.
Avec enthousiasme il explique ses essais de permaculture en buttes, montre le filet qui empêche les
fraises d’être mangées par les oiseaux, évoque ses
projets de mettre des pieds de potiron au pied des
piquets, etc. Près de son jardin, il a placardé cette
citation du sociologue orthodoxe Michel Maxime
Egger: «On ne pourra pas garder et travailler durablement le jardin de la terre sans veiller et cultiver
le jardin de notre âme, notre terre intérieure »
(La terre comme soi-même, Labor et Fides, 2012).
«TÉMOINS DU CHRIST AUPRÈS
DE NOS FRÈRES LES RURAUX»
Claude, qui a travaillé dans la ferme parentale
jusqu’à ses 23 ans reconnaît qu’il est un converti
de l’écologie, «bousculé notamment par Laudato Si,
mais heureux d’être dans cette aventure ». « Il ne
s’agit pas seulement, explique-t-il, d’une question
pratique de tri des déchets. Nous sommes des
chercheurs autour de la question du Dieu créateur.
Nous ne sommes pas venus avec notre drapeau
pour écologiser mais pour vivre l’Évangile avec cet
accent particulier. L’écologie est une question de
société à laquelle les chrétiens ont à répondre. »
La communauté s’implique dans la fête de la
Création ou encore dans le groupe «Chrétiens et
Écologie dans le Bocage » qui réfléchit entre autres
au maintien équilibré des haies sur les terres agricoles. Mais l’essentiel reste la relation à vivre dans
la prière et la vie ordinaire avec Dieu et avec
les frères ; « expérimenter que le Christ peut
nous humaniser l’un par l’autre et être témoin
de l’Évangile », commente Claude. Lui joue à
la belote dans le club des anciens et a rejoint
un groupe de peintres du village. Il est, par
ailleurs, engagé dans un groupe œcuménique
du Calvados et missionné comme délégué
diocésain à la vie religieuse.
Quant à Paul, aumônier du CMR (Chrétiens
en monde rural) pour le diocèse, disponible
comme Claude le dimanche pour célébrer la
messe, il se rend régulièrement aux Restos
du Cœur à Flers pour aider, donne un coup
de main au Comité des fêtes de La Carneille,
participe aux rencontres d’un groupe de retraités syndicalistes, et passe beaucoup de temps
dans son jardin car «physiquement, explique
l’ancien ouvrier agricole, il faut que je travaille ». Avec son accent qui continue à rouler
un torrent de cailloux de sa Garonne natale,
il déclare : «Bien sûr, on fait son trou partout
mais je suis heureux d’être là où le Seigneur
m’a tiré. Je le remercie. »
http://france.fmc-sc.org/
SOURCE
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